DEMENAGEMENT
Juste un déménagement,
quelques appareils ménagers à acheter, quelques meubles à transporter, quelques
tours de vis à donner, deux petits tours de camionnette, un peu de vaisselle et
des bouquins et des disques et des chaises et des tables basses et hautes et tous ces objets
qu’on garde au fil des années.
Juste un déménagement,
et pourtant nous étions tous là, les plus proches de tes amis, ta petite sœur,
tes frères et même s’il n’y avait eu qu’une caisse à porter, nous aurions tous
été là pour toi.
Ce n’est pas
dans un modeste HLM que tu rentres, c’est dans ton premier appartement
depuis tellement d’années, ce n’est pas un vieil immeuble fatigué aux balcons soutenus
ça et là par des étais d’acier, c’est un
palace et ta suite avec ses deux chambres, sa grande salle avec vue sur le
square et si tu ouvre bien tes oreilles tu auras le privilège de goûter les musique
bigarrées de l’Antipode.
Et tous ces objets qu’on sort de leurs
cartons, ces meubles qu’on remonte comme on remonte le temps, certains avec
difficulté tant ils s’étaient habitués à l’inutilité, toutes ces choses c’est ta mémoire qui revient d’un seul coup, c’est
ta vie qui fait son grand retour.
La journée a
été longue , épuisante, de multiples trajets, choisir le frigo et les quatre chaises
et la machine à laver, sortir la carte bancaire, composer le code confidentiel
sans lire ton bout de papier, non Laurent, c’est la touche verte qu’il faut
presser , mais non prends ton temps .
Il est vingt
heures, pas un moment tu ne t’es reposé, l’émotion te submerge de revoir toutes
tes affaires, tes vieux 33 tours, ta guitare, tes meubles remontés et prêts à
en découdre encore une fois, une journée comme un point final à une parenthèse
dans ta vie, un longue absence de quatre années entre hôpitaux et centre de rééducation,
entre lieu de vie et hébergement d’urgence, il est vingt heures et pourtant tu nous accompagneras encore tard
pour un simple repas entre frères et sœur. Enfin, pas si simple.
Tu profites de
ce bonheur des retrouvailles et les jours qui viennent tu redécouvriras toutes ces
choses qui t’appartiennent, mais nous savons, tu sais, que demain il faudra te
confronter au quotidien, aux voisins, à la vie comme les autres, avec les
autres.