Prestation compensatoire
Elle avait la
voix rauque des fumeurs, les lunettes fumées des rockeurs, le jean d’une jeune,
les traits tirés on ne sait où.
L’écran
du pécé illuminait un salon vieilli
prématurément, un canapé fatigué et peinard étalait sa laideur de skaï, ce qui
est bien normal quand on y pense.
Un matin y m’a
dit je pars, c’est tout, sans explication mais moi je savais.
Je savais
qu’il y avait l’autre, la bonne copine, ma meilleure amie. Et puis mes enfants
m’ont dit Papa est parti, c’est mieux comme çà. Y a que mon deuxième, pour lui
son père c’était tout, c’était un Dieu.
Les premières
années il me tapait pas, c’est juste qu’il avait la bougeotte, il changeait
tout le temps de travail, moi çà me plaisait pas et puis depuis son stage à V.,
tout a changé. Là bas il s’est fait des copains, tous divorcés, c’est bien
mieux on fait ce qu’on veut qu’ils lui disaient.
Quand il revenait le week end, la petite phrase a commencé, çà je l’ai entendue cette phrase
là « retires tes mains j’ les supportes plus sur moi », je l’entends
encore. Et puis il s’est mis à boire, de plus en plus et là les coups ont
commencé à pleuvoir mais il était malin, jamais la figure, des fois j’avais le
corps couvert de bleus, j’en ai bavé.
Une fois y m’a
allongé sur la table et là y m’a cogné devant les enfants, maman c’est mieux
qu’il est plus là.
Il a vu
l’assistante sociale et il a demandé à aller dans un foyer. Il travaille plus
et il m’a prévenue, pour les enfants t’auras rien, déjà que tu gardes la maison
et tous les meubles et puis comme t’es
obligée de subvenir à mes besoins je demanderai une pension pour moi. Voilà ce
qu’il m’a dit, c’est à cause de moi qu’il peut plus travailler, il est trop
malheureux maintenant sans ses enfants.
L’autre jour,
il m’a appelé il voulait revenir à la maison, moi je lui ai dit sûrement pas,
j’suis bien toute seule maintenant et avec les enfants on a pris nos petites
habitudes, c’est plus détendu parce que c’était un Monsieur Je sais tout et
fallait jamais le contredire. Je lui ai dit, je fais ce que je veux, ah ouais
tu fais la putain, c’est çà ,ben comme çà tu vas me donner plus pour la
pension, c’est sûr y peut plus me cogner, alors faut bien qu’il ait une
compensation.
Mais moi je
m’en fous, les hommes c’est fini, j’en ai trop bavé, maintenant c’est mes
enfants et moi.