GUERISON
J’attendais patiemment mon tour,
j’écoutais tranquillement les interventions de collègues connus ou non, des
sujets que je découvrais ou non, d’une oreille plus ou moins attentive. Il prit
place à la tribune avec une de ses collègues, la prestation fut sans intérêt, la lumière blafarde
et verdâtre de sa bêtise crachait quelques rayons fatigués sur l’assistance, il
était si terne, quelques rires plutôt gênés fusaient au ras de la moquette, il étala,
cerise sur l’indigeste gâteau, sa goujaterie en interrompant cavalièrement,
triste canasson, la parole de sa partenaire qui ne prit pas la peine de relever
le gant de l’imbécillité et je me disais qu’elle avait bien raison.
Et là, j’ai soudain mesuré le
chemin parcouru, plus rien ne se passait, le fil aliénant était rompu, je ne me
réjouissais pas de son naufrage, je songeais simplement comment j’avais pu me
faire démolir par un benêt pareil, je songeais à ces mois d’arrêt maladie,
terré dans ma dépression, je pensais à ces trois années de traitements chimiques,
je pensais à tous ceux qui m’aiment, à ceux qui m’apprécient , à ceux qui ne me
reconnaissaient pas, pris que j’étais dans la nasse manipulante.
Il pouvait bien se pavaner dans
sa nullité, il pouvait bien étaler son insondable vacuité,la chanter
dans toutes les langues, sur tous les tons, c’était terminé
et je me foutais tout autant de ce que
les autres pouvaient penser d’un tel personnage, je n’ai plus besoin de mettre
le baume de la vengeance sur mes cicatrices, j’ai repris mon chemin et je sais
que sur ce chemin là je ne le croiserai plus, définitivement.